La génération penchée sur son smartphone, persuadée que le monde n’a pas existé avant elle, sera bien surprise quand ses petits-enfants se moqueront d’elle en ricanant sur ce vieil appareil. C’est un phénomène classique mais qui s’aggrave : la propension des humains à croire qu’ils sont indépassables. On se moque aujourd’hui de ce qui était un progrès technique (aujourd’hui on dit innovation, c’est plus chic) il y a 20 ou 30 ans. Un jour, pas si lointain, le smartphone fera rire les enfants qui se demanderont bien pourquoi leurs grands parents passaient autant de temps avec cet objet qu’ils payaient si cher. Un peu comme les moins de 40 ans se moquent aujourd’hui avec condescendance du Minitel des années 80.
A tous ces éclopés de la mémoire, un conseil s’impose : regarder sur OCS la série « 3615 Monique ». Ils apprendront beaucoup à la fois sur les années 80 et… sur eux-mêmes, comprenant mieux ainsi qu’il faut toujours relativiser l’orgueil humain.
Le Minitel, quelqu’un se souvient ?
Cette boîte carrée avec un écran et un clavier minuscules, que l’on reliait au téléphone (fixe évidemment) pour consulter toutes sortes de services. Quelqu’un se souvient encore ce de petit sifflement du téléphone, signal attendu pour presser le bouton connexion et découvrir des « images » en noir et blanc formées sur un écran de 25 lignes de 40 caractères ? Technophiles des années 80, vous vous rappelez du format de composition des images dénommé Vidéotex. Dans ces années-là on pouvait lire Vidéotex magazine. Il y avait le « 11 », l’annuaire gratuit pendant les trois premières minutes. Et puis surtout, il y avait les jeux et messageries dites « roses », 3615 Ulla, Aline et autres Maud, qui occupaient nos soirées à draguer d’improbables créatures sur un écran qui ne pouvait afficher que de vagues silhouettes. Les factures téléphoniques (on payait très cher le téléphone fixe en ce temps-là) explosaient à la fois le compte en banque et les relations conjugales.
Il y avait beaucoup d’argent dans la Télématique (c’était le nom officiel). La presse, même la plus conservatrice, ne rechignait pas à ouvrir des 3615 dans lesquels il y avait quasiment toujours une messagerie « rose ». Xavier Niel a commencé sa fortune dans ce secteur.
Evidemment, cet objet très français et donc très centralisé (le minitel n’était qu’un terminal) n’a pas survécu au XXIè siècle. Il a été balayé par Internet.
3615 Monique, la série pour comprendre la télématique
Le film de David Fincher, Socials Networks, aide à comprendre l’histoire de Facebook et de Mark Zuckerberg. De la même manière, 3615 Monique éclaire cette période si particulière du Minitel dans la France des années 80.
C’est l’histoire de trois étudiants aux profils très opposés qui comprennent le potentiel du Minitel, révolutionnaire pour l’époque, en particulier en matière de désinhibition sexuelle. Ils créent une start-up avant l’heure sur la base d’une idée simple : l’économie du sexe fait toujours bon ménage avec la technologie. Grâce au minitel le tchat érotique rencontrait un besoin important dans une époque encore pas tout à fait libérée.
La série est légère et drôle mais raconte en même temps ce qu’était la France de l’époque et son passage du giscardisme au mitterrandisme. La saison 1 est un petit bonbon acidulé, comme ceux que vendaient encore les ouvreuses dans les cinémas d’autrefois. La saison 2 arrive en décembre 2022. Ne la manquez pas.